Faits de l’affaire
L’affaire a été intentée par l’Association pour l’information des consommateurs (VKI), une organisation de consommateurs, contre Sofatutor, une société fournissant une plateforme d’apprentissage en ligne. Le commerçant a permis aux consommateurs de tester gratuitement la plateforme pendant 30 jours à compter de la signature et de résilier le contrat à tout moment pendant cette période. Conformément aux conditions générales, si le contrat n’est pas résilié à temps, la période d’abonnement payant démarre. En outre, le contrat était à nouveau renouvelé s’il n’était pas résilié avant la fin de la période d’abonnement payante.
Selon le VKI, Sofatutor a violé les dispositions nationales mettant en œuvre l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs (CRD), en limitant les droits de rétractation des consommateurs accordés par cette disposition. L’organisation a fait valoir que le consommateur dispose d’un droit de rétractation non seulement lorsqu’il réserve un essai gratuit, mais également lorsqu’un abonnement gratuit est converti en un abonnement payant et lorsque cet abonnement payant est renouvelé. Ne sachant pas quelle interprétation suivre, la Cour suprême d’Autriche a décidé de suspendre la procédure et de renvoyer la question à la CJUE.
Jugement de la Cour
Malheureusement, la Cour a refusé un niveau plus élevé de protection des consommateurs dans la présente affaire et n’a même pas reconnu le problème. Malgré une attention accrue portée aux risques des abonnements renouvelables (voir par exemple C. Busch, Payer pour jouer…), la Cour a choisi d’écarter les différences entre la vente de biens et la prestation (à long terme) de services. Le jugement a accordé une attention considérable à but du droit de rétractation, soulignant qu’il « vise à compenser le désavantage pour le consommateur résultant d’un contrat à distance en lui accordant un délai de réflexion approprié pendant lequel il peut examiner et tester les biens acquis » (par. 39). Selon la Cour, le même raisonnement s’applique à la vente de biens et à la prestation de services (par. 41), bien qu’il n’y ait aucune explication à cette affirmation.
La conclusion selon laquelle il n’existe essentiellement aucune différence entre la vente de biens et la prestation (à long terme) de services, en ce qui concerne le droit de rétractation, a conduit la Cour à se concentrer sur juste un moment donné, c’est-à-dire lorsque le contact est conclu pour la première fois. En particulier, l’arrêt souligne l’importance de fournir aux consommateurs tous les information en ce moment. Finalement, un lien direct a été établi entre les informations précontractuelles et la fonction du droit de rétractation (paragraphe 47).
Pour la Cour, si toutes les conditions pertinentes pour la relation future sont clairement communiquées au moment de la conclusion du contrat, rien ne justifie un nouveau droit de rétractation ultérieur, ni aucune obligation commerciale y afférente (par exemple, informer sur les possibilité d’exercer ce droit, lors du renouvellement de l’abonnement). En parvenant à cette conclusion, la Cour a explicitement exclu une interprétation nationale plus protectrice du droit de retrait, telle que celle qui existe apparemment en droit autrichien (paragraphes 24 et 38).
Pensée finale
Ma principale critique à l’égard de l’arrêt Sofatutor est l’apparente ignorance de la Cour des problèmes réels auxquels sont confrontés les consommateurs dans l’économie de l’abonnement. C’est notamment le cas du contrat renouvellement, qui a généralement lieu assez longtemps après la conclusion du contrat initial. La Cour a peut-être reconnu que le droit de rétractation n’est pas bien adapté au scénario actuel et que l’attention devrait se tourner vers le droit de résiliation (non harmonisé dans la CRD). Cependant, le jugement entretient l’image fictive du consommateur dont les besoins de protection se limitent à l’information suffisante au moment de la conclusion du contrat, même dans le cas de contrats à long terme.
Si la Cour voulait innover en matière de droit de rétractation, la CRD offre sans doute une ouverture pour le faire. Plus important encore, l’objet du droit ne doit pas nécessairement se limiter à l’inspection des biens (et en particulier des services). En fait, son objectif est déjà très différent pour les contrats hors site (par exemple les ventes à domicile), dans lesquels le consommateur bénéficie d’un « délai de réflexion ». Il est admis que le consommateur peut dans ces cas être pris par surprise et ne pas être réellement en mesure d’évaluer les avantages et les inconvénients de la conclusion d’un contrat. Il semble plausible qu’un consommateur qui s’engage dans une relation à long terme soit également incapable de s’imaginer dans environ un an. C’est peut-être le renouvellement qui surprend le consommateur et pourrait ainsi justifier un nouveau droit de rétractation.
Ce qui ressort clairement de l’arrêt Sofatutor, c’est que de lege lata le droit de rétractation ne peut pas être une solution aux abonnements renouvelables. Notre attention doit donc se tourner vers d’autres options juridiques évoquées dans la recherche, telles que rappels sur les renouvellements automatiques. Il est peut-être également temps d’examiner de plus près la limitation des droits de résiliation des consommateurs et leur conformité avec l’UCTD.