X v Coinbase Ireland Ltd ECLI:NL:RBNHO:2023:5305 intéresse le blog pour sa conclusion à mon humble avis fragile sur la loi applicable à la réclamation. L’affaire est une soi-disant escroquerie de boucherie de porc, un terme dont je n’avais jamais entendu parler auparavant. Des sites comme ceux-ci vous diront ce que cela signifie. Essentiellement, dans l’affaire en cause, la demanderesse avait acquis des crypto-monnaies sur un compte Coinbase et avait ensuite été amenée à les transférer dans un « portefeuille » dont elle avait perdu le contrôle.
Coinbase est défendeur, car les fraudeurs sont clairement introuvables. La réclamation de diverses manières tente de faire en sorte que Coinbase couvre les dommages d’environ 170 000 €. La compétence est établie par A17 ff Bruxelles Ia (le titre de consommation). [4.2.4] il s’avère que ses activités étaient dirigées vers les Pays-Bas même sans qu’elle ait une licence bancaire néerlandaise : elle a facilité l’utilisation de l’option de paiement néerlandaise iDEAL ; il a répertorié les Pays-Bas comme l’un des pays dans lesquels les services d’échange de crypto-monnaie étaient disponibles ; il proposait une application néerlandaise et un site Web néerlandais ; il avait payé pour que Coinbase apparaisse dans les requêtes des moteurs de recherche en néerlandais pour coinbase et pour un lien vers son site Web pour le suivi de ces requêtes.
La loi applicable est réputée être la loi néerlandaise, appliquant Rome I. Le tribunal se demande d’abord si la demande est couverte par Rome I ou Rome II. En référence au besoin de cohérence entre Bruxelles Ia et le Règlement de Rome (les lecteurs réguliers du blog savent que je ne suis pas convaincu ; voir par exemple la balise ‘cohérence’ ou ‘lecture croisée’ dans le champ de recherche du blog) et à la CJUE Reliantco , le tribunal retient que c’est Rome I qui est engagée. Et ce malgré le fait que la plainte soit largement fondée sur le commerce déloyal, un délit délictueux légalement circonscrit aux Pays-Bas. À cet égard, la demande fait écho à la CJUE Winkingerhof, mais le tribunal néerlandais opte ici pour un contrat dans le style Sharpston AG Ergo : [4.3.4] sans le contrat entre les parties, il n’y aurait pas eu actuellement de réclamation.
L’application par le tribunal de l’article 6 Rome I coupe ensuite de nombreux coins : il note l’argument de Coinbase selon lequel ses CG identifient le droit irlandais comme la lex contractus, reconnaît que selon Rome I (uniquement) le droit néerlandais obligatoire l’emporte sur le droit irlandais, mais alors [4.3.7] exclut l’intégralité de l’application de la lex voluntatis dans les CG au seul motif que l’application du droit irlandais serait « trop onéreuse » pour le consommateur, « ne serait-ce que » parce qu’il est beaucoup plus difficile de trouver des conseillers juridiques aux Pays-Bas connaissant loi irlandaise. Tout cela est au mieux bâclé.
Le reste du jugement rejette ensuite la demande sur la base du droit néerlandais.
Geert.